Site Loader
Rue Hamdani Lahcene, N 23 Coopérative Mohamed Boudiaf Hydra-Alger Algeria

Rapports de gestion : de l’obligation à la pertinence.

Les gestionnaires responsables de sociétés doivent  rendre compte de l’activité des entités dont ils ont la charge de direction au cours des assemblées générales ordinaires de sociétés.

Au-delà de l’obligation faite à ces dirigeants d’établir un rapport de gestion, il importe de convenir quelle information pertinente doit y être rapportée, car entre obligation et pertinence, l’information de gestion peut être restituée sous différentes formes, encore faut-il trouver la bonne.

Le rapport de gestion tire sa base légale principalement du code de commerce.

Le rapport de gestion est forcément un document écrit. Au sens de l’article 716 du code de commerce, l’obligation de l’établir incombe, à chaque clôture d’exercice, au conseil d’administration ou aux gérants – selon la forme de la société –  sous la forme d’un rapport écrit sur la situation de la société et l’activité de  celle-ci pendant l’exercice écoulé.

Cette obligation est précisée dans le code de commerce, sous le dispositif relatif aux dispositions communes aux sociétés commerciales dotées de la personnalité morale, et pour leurs spécificités sous les dispositions régissant chaque type de société, principalement la société à responsabilité et la société par actions.

Au titre des dispositions communes, le changement de la forme du bilan et des méthodes d’évaluation doivent être rapportés par l’organe dirigeant qui doit prendre le soin de présenter les comptes établis selon les formes et méthodes tant anciennes que nouvelles.

Le rapport de l’organe dirigeant doit également présenter le cas échéant toute prise de  participation dans une société ayant son siège social en Algérie ou toute acquisition de  plus de la moitié du capital d’une telle société. Une fois ces participations acquises le rapport de gestion doit, à chaque exercice, rendre compte de l’activité des filiales de la société, par branche d’activité en faisant  ressortir les résultats obtenus[1].

Dans le cas des sociétés à responsabilité limitée, la préparation du rapport de gestion, désigné dans le code de commerce comme rapport sur les opérations de l’exercice, relève de la responsabilité  du gérant. Il doit être soumis, au même titre que les comptes sociaux, à l’approbation des associés réunis en assemblée générale.

Le gérant de l’Entreprise Unipersonnelle à Responsabilité Limité (EURL) est également tenu d’établir ce rapport au même titre que l’inventaire et les comptes annuels, alors que sous d’autres juridictions ce type de société est dispensé de l’obligation du rapport de gestion lorsque l’associé unique assure personnellement la gérance de la société.

Dans le cas particulier des sociétés par actions dotées d’un conseil de surveillance, le code de commerce algérien prévoit, pour cette forme de société, que le directoire présente au conseil de surveillance un rapport sur sa gestion, une fois par trimestre ainsi  qu’à la fin de chaque exercice.

Après la clôture de chaque exercice, le directoire présente au conseil de surveillance, aux fins de vérifications et de contrôle, les documents sociaux, les comptes sociaux ainsi que son  rapport écrit sur la situation de la société et l’activité de celle-ci pendant l’exercice écoulé.

Le conseil de surveillance est tenu, à son tour, de présenter à l’assemblée générale ses observations sur le rapport du directoire ainsi que sur les comptes de l’exercice.

Dans les sociétés en cours de liquidation, c’est au liquidateur qu’il incombe d’établir dans les trois mois de la clôture des comptes un rapport écrit par lequel il rend compte des opérations de liquidation au cours de l’exercice écoulé[2].

Ce qu’est le rapport de gestion.

Compte tenu des prescriptions légales, le rapport de gestion, également désigné par rapport  sur les opérations de l’exercice, est un compte rendu obligatoire qui rend compte de l’activité de l’exercice écoulé et qui doit apporter de la transparence sur les actes de gestion de ceux qui sont mandatés pour la gestion de la société.

Il permet de formaliser l’information à laquelle a droit chaque associé ou actionnaire rendu obligatoirement destinataire de ce rapport, selon le cas quinze jours[3] ou un mois[4] au moins, avant la date de l’assemblée générale ordinaire.

Dans les pays où il fait l’objet d’une publication, le rapport de gestion apporte de la pertinence à l’information qui y est portée, car au-delà de rendre compte aux associés ou actionnaires, il apporte des éclaircissements aux tiers pour que l’entité concernée soit mieux connue et comprise de la part de tous ceux qui ont un intérêt direct ou indirect avec la société. C’est à ce niveau que le rapport de gestion est à la limite d’être un outil de communication.

C’est d’ailleurs dans cet esprit que certaines entités développent, dans le prolongement de ce rapport, un rapport annuel désigné également par ‘Plaquette annuelle’ dont le contenu n’est pas réglementé mais qui utilise, en grande partie, les informations du rapport de gestion.

Contrairement aux pays où le rapport de gestion fait partie des documents qui doivent être déposés au greffe du tribunal, il n’existe pas, en Algérie, d’obligation à le publier, la publication des comptes se résumant chez nous à un dépôt des comptes sociaux, au centre national du registre de commerce, accompagné du procès-verbal de l’assemblée générale, dans le mois qui suit leur adoption par ladite assemblée[5].

Le contenu du rapport de gestion n’est pas réglementé.

Au-delà de l’obligation d’y rapporter la situation de la société et son activité pendant l’exercice écoulé, il n’y pas, en Algérie, d’orientation réglementaire sur son contenu.

C’est pour cette raison qu’en pratique la forme des rapports de gestion varie d’une société à une autre, selon le secteur d’activité auquel elle appartient et notamment lorsqu’il s’agit d’activités réglementées.

En règle générale, le rapport rend compte de la situation au cours de l’exercice écoulé mais également de son évolution prévisible. Cet enchainement entre les réalisations et les perspectives est souvent présenté par principale fonction de l’entreprise (commerciale, approvisionnement, investissement, production, ressources humaines, financière, hygiène sécurité….) et par métier selon le cas.

Il est important d’y rappeler les faits marquants de l’exercice clôturé mais également les évènements importants survenus entre la date de clôture des comptes et la date d’établissement du rapport de gestion, ces évènements pouvant avoir un impact sur les états financiers à approuver.

Outre les mentions obligatoires, telles que les changements de méthode comptable et les modifications  intervenues dans la présentation des comptes annuels,  on y retrouve souvent des analyses sur le chiffre d’affaires et l’évolution de l’activité, l’endettement et la situation financière, la performance et les résultats de la société.

Des informations spécifiques peuvent également être apportées selon leur pertinence pour l’appréciation des utilisateurs des états financiers comme par exemple les éléments de charges réintégrées pour justifier la différence entre le résultat comptable et le résultat fiscal ou encore les principales décisions prises en réunions du conseil d’administration ou du directoire, selon le cas.

Il n’y pas de limite au contenu du rapport de gestion mais la recherche combinée de la transparence et du compte rendu du dirigeant responsable doit lui trouver une juste limite.

Entre obligation et pertinence, le contenu du rapport de gestion doit être équilibré.

Si les dirigeants  sont libres de choisir la présentation et le niveau de détail à communiquer, leur rapport ne doit pas verser, par excès, dans des développements abondants sans utilité pour les actionnaires ou associés.

A l’opposé, ils ne doivent pas traiter ce rapport comme une simple formalité induisant de l’information trop sommaire et abrégée au point où l’utilisateur aura toujours des questionnements sur la gestion de la société.

Les informations rapportées doit être compréhensibles par tous et être pertinentes en tenant compte de la motivation des utilisateurs et en centrant l’information sur les faits  importants survenus ou à venir.

Si la conformité à la réglementation algérienne résume le rapport à une description succincte de l’activité et de transactions réglementées comme les prises de participation et les résultats de filiales, les législations dans d’autres pays ont étendu le champ de l’information à rapporter.

C’est ainsi que l’information prévisionnelle est devenue obligatoire pour les sociétés anonymes en France au titre des perspectives d’avenir ou encore l’information concernant les administrateurs pour ce qui concerne les mandats exercés par eux dans toute société, leur rémunération et les avantages en nature qui leur sont versés tant dans la société concernée que dans les sociétés contrôlées ainsi que les engagements pris par  la société à leur bénéfice.

La référence aux principaux risques et incertitudes auxquels la société est confrontée est également requise en France pour certaines sociétés en fonction de seuils de critères donnés.

Plus récemment, un nouveau décret[6] a été publié en France pour  exiger  des informations relatives aux aspects d’environnement, de personnel et d’engagements sociétaux en faveur du développement durable pour certaines sociétés.  

Devant tous ces compléments d’informations réglementées, ailleurs que sur notre territoire, les mandataires sociaux ne doivent pas verser dans l’excès d’information ou appliquer des restitutions inadaptées à la taille des entreprises ou à leur industrie.

L’information fournie, pour être pertinente doit être servie aux associés ou actionnaires, voire aux autres utilisateurs, en temps opportun, dans les délais pour que les décisions utiles puissent être prises à temps. La pertinence est également dans le contenu des informations qui doivent être complètes sans être forcément abondantes.

Au-delà de leur pertinence, ces informations doivent être sincères et c’est pour cette raison que le code de commerce a prévu que les commissaires aux comptes vérifient également la sincérité des informations données dans le rapport du conseil d’administration ou du directoire, selon le cas, et dans les documents adressés aux actionnaires, sur la situation financière et les comptes de la société.

Par ailleurs, l’information rapportée dans certains cas peut être confidentielle et l’opportunité d’en faire état dans un document publiable ou plus facilement accessible doit être appréciée avec attention.

Les mandataires sociaux doivent arriver à  trouver le dosage nécessaire à l’information à communiquer, encore faut-il qu’ils tiennent  compte du fait que les destinataires d’un tel rapport n’ont pas toujours des connaissances développées dans les matières financières et comptables. Autant qu’ils soient didactiques à cette occasion, car une information trop élaborée perd de sa richesse lorsqu’elle n’est pas comprise.


[1] Article 732 bis 1 du code de commerce.

[2] Article 789 du code de commerce.

[3] Pour les sociétés à responsabilité limitée.

[4] Pour les sociétés par action.

[5] Article 717 du code de commerce.

[6] Décret n° 2012-557 du 24 avril 2012 relatif aux obligations de transparence des entreprises en matière sociale et environnementale.

Post Author: Samir Hadj Ali